La réforme décriée du RSA généralisée depuis le 1er janvier

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iconeExtrait de l’hebdo n°3947

Conditions d’accès modifiées, inscription automatique à France Travail, contrat d’engagement… : le revenu de solidarité active évolue en profondeur. Quelque 1,8 million d’allocataires sont concernés.

Par Anne-Sophie Balle— Publié le 07/01/2025 à 13h00

Le versement de l’allocation RSA est désormais conditionné à la réalisation de quinze à vingt heures d’activité hebdomadaire.
Le versement de l’allocation RSA est désormais conditionné à la réalisation de quinze à vingt heures d’activité hebdomadaire.© Patrick Allard/RÉA

1. Revenu de solidarité active.

2. Caisse d’allocations familiales.

Après une phase d’expérimentation dans une cinquantaine de départements, la réforme du RSA1 est, depuis le 1er janvier 2025, généralisée à l’ensemble du territoire national. Issue de la loi du 18 décembre 2023 pour le plein emploi, elle introduit plusieurs changements majeurs pour près de deux millions d’allocataires. À commencer par l’inscription automatique de tous les bénéficiaires comme demandeurs d’emploi, y compris ceux exerçant une activité professionnelle. Jusqu’à présent, seuls 40 % des allocataires étaient inscrits à France Travail. Désormais, cette démarche – « obligatoire et automatique » – précise la CAF2, concernera tous les bénéficiaires ; en l’occurrence, 1,2 million de personnes supplémentaires sont concernées.

Ces « nouveaux » demandeurs d’emploi seront d’abord classés dans une catégorie d’attente (catégorie G, spécifiquement créée pour eux) jusqu’à leur entretien d’orientation, lequel déterminera leur répartition dans l’une des catégories de France Travail.

Versement conditionné à l’activité

3. Personnes souffrant de handicap, d’invalidité ou de problème de santé, et parents isolés d’enfants de moins de 12 ans sans solution de garde.

Autre changement majeur, particulièrement décrié par les organisations syndicales et le mouvement associatif : le versement de l’aide devient conditionné à la réalisation de quinze à vingt heures d’activité hebdomadaire d’insertion, dont la nature sera précisée dans un contrat d’engagement réciproque (CER) signé avec l’allocataire. Interrogée à ce sujet, la ministre du Travail, Agnès Panosyan-Bouvet, a assuré qu’il ne s’agissait « pas de travail gratuit ». Mais les craintes demeurent. Lydie Nicol, secrétaire nationale CFDT chargée des questions d’insertion, le répète : « Avoir des moyens convenables d’existence, c’est ce que l’on porte depuis l’origine. On l’avait d’ailleurs posé au début du projet de loi plein emploi en disant qu’il fallait d’abord partir du droit à obtenir un emploi, qui est un droit constitutionnel, au lieu de partir de la conditionnalité du minimum vital. » Hormis quelques cas particuliers3, cette conditionnalité s’appliquera à tous les bénéficiaires. Une nouvelle sanction, baptisée dispositif « suspension-remobilisation », suspendra le versement de l’allocation de l’allocataire.

« Aujourd’hui, on va mettre en place une loi qui, pour compenser le volet sanctions auquel on s’est opposé, propose un accompagnement renforcé, mais sans prévoir de moyens supplémentaires », poursuit la secrétaire nationale. Car le plus grand flou demeure au sujet des mesures d’accompagnement renforcé des bénéficiaires.

Un bilan plus que mitigé

Le rapport final d’évaluation de l’expérimentation de la réforme, publié en novembre 2024 par le ministère du Travail et portant sur le suivi de 500 allocataires, salue les « effets globalement positifs de l’accompagnement sur la situation des bénéficiaires » et des délais d’orientation raccourcis. Mais « certains freins importants demeurent », poursuit le rapport, notamment la difficulté à recruter des agents pour accompagner les allocataires, et le coût de cette prise en charge renforcée, qui « oscillerait entre 500 et 1 200 euros par allocataires selon la modalité d’accompagnement ».

À propos de l'auteur

Anne-Sophie Balle
Rédactrice en chef adjointe de Syndicalisme Hebdo

Dans un contexte de forte tension budgétaire, et alors que France Travail s’apprête à tailler dans ses effectifs, c’est l’applicabilité même de la réforme qui est questionnée. Les agents de France Travail et conseillers en insertion professionnelle rencontrés ces dernières semaines se disent particulièrement inquiets, entre autres quant à leur capacité à suivre un nombre encore plus élevé d’allocataires.