Premier tour de piste d'une négociation express

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Réunis au siège de l’Unédic le 22 octobre, les partenaires sociaux ont dressé le cadre de la négociation assurance chômage, pour laquelle l’accord trouvé en novembre 2023 doit servir de base à la discussion.

Par Anne-Sophie Balle— Publié le 24/10/2024 à 13h10

Olivier Guivarch, secrétaire national, est le chef de file CFDT dans le cadre de cette négociation.
Olivier Guivarch, secrétaire national, est le chef de file CFDT dans le cadre de cette négociation.© Syndheb

Trois semaines, pas une de plus. Voilà donc le temps imparti aux acteurs syndicaux et patronaux pour mener leur « négociation flash » sur l’assurance chômage – le 22 octobre dernier ayant marqué le lancement officiel des discussions. Lors d’un premier tour de table, les partenaires sociaux ont pu rappeler l’état d’esprit dans lequel se tient ce cycle de négociations resserré. « Le nouveau contexte politique, plus favorable à la négociation, doit nous permettre à la fois de respecter l’accord de novembre 2023, auquel nous tenons toujours, de déterminer les dispositions qui concernent la filière seniors et de pouvoir établir des règles d’indemnisation des demandeurs d’emploi dans la durée », résumait Olivier Guivarch, chef de file CFDT, à l’issue de la séance.

« Dans les faits, compte tenu du délai qui nous est imparti, on ne pourra pas ouvrir plus de sujets que celui de la filière seniors », point laissé en suspens au moment de l’accord de 2023 mais déjà « provisionné » avec une enveloppe de 440 millions d’euros d’économies.

D’autres pistes à explorer

« Notre mandat, lui, n’a pas varié », explique encore la négociation CFDT, qui dit avoir hâte de parler des bornes d’âge, tout en prévenant : « Il faut bien comprendre que l’on a déjà fait beaucoup d’efforts en 2023 pour trouver un point d’équilibre auquel on tient. Des économies supplémentaires ont beau être demandées aujourd’hui, elles ne nous semblent pas pour autant très justifiées. »

1. Le régime d’indemnisation des frontaliers découle du règlement (CE) no 883/2004 du 29 avril 2004 entre la France et l’Union européenne, élargi à la Suisse.

Bien qu’aucune lettre de cadrage n’ait été transmise aux partenaires sociaux, la ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet, a demandé aux syndicats et au patronat de trouver une voie de passage afin de « proposer des mesures permettant de générer annuellement 400 millions d’euros d’économies supplémentaires » sur le régime d’assurance chômage. À ce titre, le cas des travailleurs frontaliers – qui cotisent dans le pays d’emploi mais sont indemnisés par le pays de résidence (en l’occurrence la France) – a été évoqué, notent les négociateurs, mais reste « compliqué à traiter ».

En effet, ce régime spécifique1 coûterait chaque année à la France 800 millions d’euros, selon les estimations de l’Unédic. « La mesure pourrait être regardée au regard des 400 millions d’euros supplémentaires demandés, suggère Olivier Guivarch. Mais cela relève plus de la responsabilité du gouvernement et de l’action politique que de la décision des partenaires sociaux. »

Du moins en plus

À propos de l'auteur

Anne-Sophie Balle
Rédactrice en chef adjointe de Syndicalisme Hebdo

Pendant cette première séance, les partenaires sociaux ont également pris connaissance des chiffrages actualisés par l’Unédic des mesures inscrites dans l’accord trouvé en 2023. In fine, « on a plus de réduction de dépenses que prévu », résume Olivier Guivarch. Ces différents préalables posés, la négociation va entrer dans le vif du sujet à partir du 29 octobre, date de la prochaine séance.

L’Unédic abaisse ses prévisions financières et pointe des “irritants”

Quelques heures avant le début de la négociation, l’Unédic dévoilait ses dernières prévisions financières 2024-2027 avec un excédent de 300 millions d’euros en 2024, excédent revu à la baisse par rapport à ce qu’avait affiché l’organisme paritaire en juin dernier (900 millions d’euros). Au-delà du contexte économique dégradé, les ponctions de l’État (12 milliards d’euros de 2023 à 2026) affectent les finances du régime, qui a d’autant plus de mal à rembourser sa dette.

« L’État a pris le pouvoir sans assumer les responsabilités financières de ses décisions », résument ainsi les représentants syndicaux et patronaux, qui tenaient une conférence de presse dans les locaux de l’Unédic ce 22 octobre. Cela illustre « le ras-le-bol que nous avons et qui grossit », pointe son président, Jean-Eudes Tesson (Medef), citant par exemple la « dette Covid » (rappelons que l’Unédic a dû prendre en charge les mesures d’urgence comme l’activité partielle), le financement de France Travail ou encore le cas des salariés frontaliers, qui représentent 800 millions d’euros de dépenses par an. « On n’a pas les frontaliers dans le collimateur, tempère Patricia Ferrand, vice-présidente (CFDT) de l’Unédic. Mais le fait est que ce système a des effets collatéraux. Notre rôle, c’est de dénoncer la situation et d’espérer que des solutions soient trouvées. » Plus globalement, ces « irritants » reposent la question du lien entre gouvernance et financement du régime. « Quand l’Unédic contribue par exemple à 80 % du financement de France Travail, on pourrait imaginer qu’il soit plus associé aux décisions stratégiques de cet opérateur ! »