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Extrait de l’hebdo n°3909
Si les comptes de l’Unédic sont dans le vert, le désendettement du régime est freiné par les ponctions de l’État, qui fait craindre aux partenaires sociaux une nouvelle invitation à remettre l’ouvrage sur le métier… alors que l’accord trouvé fin 2023 n’est toujours pas entré en vigueur.
C’est une mine maussade qu’affichaient les partenaires sociaux à la présentation des prévisions financières de l’Unédic, le 20 février dernier. De fait, le vert dans lequel se trouvent les comptes du régime est un vert terne, jauni par la dégradation de la conjoncture économique, d’une part, et les intentions d’un gouvernement bien décidé à « faire les poches » de l’Unédic, d’autre part. Son excédent, encore prévu à 5 milliards d’euros en septembre 2023, ne serait finalement que de 1,1 milliard d’euros en 2024 avant de repartir à la hausse à compter de 2025 jusqu’à atteindre 11,2 milliards en 2027. De quoi désendetter le régime (dont la dette avait explosé pendant la période Covid), mais à un rythme bien moindre qu’espéré. « La conséquence d’un choix de l’État », estime sans ambages la vice-présidente (CFDT) de l’Unédic, Patricia Ferrand. Ce choix, c’est de ponctionner d’ici à 2026 12 milliards d’euros sur les recettes du régime pour financer France Travail et France compétences, deux opérateurs dédiés à l’emploi et la formation, sur lesquels le gouvernement compte s’appuyer pour atteindre le plein-emploi.
Dés pipés
En actant ce prélèvement par décret à la fin décembre 2023, le gouvernement s’est-il ménagé par anticipation une porte de sortie ? Est-ce un « prétexte » pour demander aux partenaires sociaux de se remettre autour de la table afin d’opérer de nouveaux changements ? Tous ont en tête le discours de politique général du Premier ministre prononcé fin janvier. Gabriel Attal expliquait alors que « si la trajectoire de l’assurance chômage devait dévier », il n’hésiterait pas à demander aux partenaires sociaux de rouvrir les discussions « sur la base d’une nouvelle lettre de cadrage », et ce, en vue d’« inciter toujours plus à la reprise du travail ». Cette impression que la partie est déjà jouée d’avance ne plaît pas aux organisations tant syndicales que patronales.
Il y a quelques jours, les annonces de Bercy d’un nouveau « coup de rabot » de 10 milliards d’euros ont également provoqué des haussements de sourcils côté syndical – et la peur d’un relèvement du taux (11 % actuellement) des recettes que l’Unédic doit consacrer au financement de France Travail. Les gestionnaires de l’Unédic, toujours dans l’attente d’une réunion avec le ministère du Travail pour finaliser la convention tripartite de France Travail, s’inquiètent. « On attend des engagements financiers et pluriannuels de l’État vis-à-vis de France Travail. Ces annonces ne peuvent qu’accentuer les crispations », déplore Patricia Ferrand.