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Extrait de l’hebdo n°3941
Les États membres de l’Union européenne ont jusqu’au 15 novembre 2024 pour transposer dans leur corpus législatif la directive européenne, adoptée il y a deux ans. En France, le processus a pris du retard, ce que regrette la CFDT.
La récente dissolution de l’Assemblée nationale a quelque peu bousculé les calendriers… Alors que la directive UE 2022/2041 relative à des salaires minimaux adéquats dans l’Union européenne a été adoptée en octobre 2022, la France termine ces jours-ci sa transposition afin d’être dans les clous à la date fatidique, fixée par l’UE au 15 novembre 2024. « A priori, le délai devrait être tenu, estime Luc Mathieu, secrétaire national de la CFDT chargé des politiques de rémunération. Mais nous regrettons cette transposition tardive, qui fait que tout le monde est pressé. » Une réunion avec le ministère du Travail s’est tenue à la fin du mois d’octobre et a permis d’y voir plus clair quant aux ambitions françaises concernant ce texte.
Renforcement du rôle des partenaires sociaux
La France disposant déjà d’un salaire minimum national, le Smic, et alors que 98 % des salariés français (selon l’OCDE) sont couverts par une convention collective, une partie des dispositions de la directive sont donc déjà appliquées dans l’Hexagone. Néanmoins, la portée du texte européen ne s’arrête pas là puisque ce dernier doit renforcer le rôle des partenaires sociaux dans la définition et la fixation des salaires minimaux. « En France, le Smic est revalorisé automatiquement chaque 1er janvier selon une formule de calcul qui prend en compte les évolutions des salaires de base et l’inflation. Si l’inflation est trop élevée, une ou plusieurs revalorisations peuvent avoir lieu durant l’année. C’est ce qui s’est passé en 2021, 2022 et 2023 », rappelle Luc Mathieu.
Par ailleurs, « le groupe d’experts sur le Smic remet chaque année un rapport avec une préconisation pour ou contre (bien souvent contre, d’ailleurs) un coup de pouce. Les partenaires sociaux sont auditionnés dans ce cadre, et la Commission nationale de la négociation collective, de l’emploi et de la formation professionnelle (CNNCEFP) rend également un avis, et ça s’arrête là », poursuit le secrétaire national. « Il est proposé que le comité d’experts produise un prérapport, dont les partenaires sociaux pourraient débattre au sein du Haut Conseil des rémunérations, de l’emploi et de la productivité, et qu’un avis, en plus de celui de la CNNCEFP, soit produit. La CFDT demande que les experts puissent aussi répondre aux observations des partenaires sociaux. »
Adéquation requise avec le niveau de vie du pays
L’autre point de la directive que la France doit transposer concerne l’adoption de critères qui permettent d’estimer que le salaire minimum est bien en adéquation avec le niveau de vie du pays. La directive propose que le salaire minimum représente 60 % du salaire médian brut et 50 % du salaire moyen brut, tout en laissant la possibilité aux États européens de choisir d’autres critères. « Notre problème, c’est que ces indicateurs fiables sont publiés avec deux ans de retard. Ainsi, les données 2022 ont été publiées en 2024. L’autre indicateur dans la balance, c’est celui du salaire moyen par tête, qui est publié tous les trimestres. Selon les économistes de notre connaissance, l’équilibre entre ces trois indicateurs pourrait être satisfaisant », indique le secrétaire national.
Enfin, le dernier point de la transposition concerne la convergence entre le Smic de Mayotte et celui pratiqué dans le reste du territoire national. Depuis le 1er novembre 2024, il est de 8,98 euros brut l’heure à Mayotte, et de 11,88 euros dans le reste du territoire national (soit plus de 32 % d’augmentation). « Le gouvernement veut accélérer la convergence entre ces deux Smic… sans pour autant prévoir de délai à ce stade », précise Luc Mathieu. L’application de toutes ces nouvelles dispositions suppose la publication d’un décret dans les tout prochains jours.