“Prioriser les priorités, c’est dur humainement”

Retrouvez le dossier complet
Une crise… et des innovations

Dans les commissions logement, les militants CFDT s’investissent pour faciliter l’accès des salariés au logement. Mais leurs moyens semblent parfois dérisoires face à l’ampleur de la tâche. Rencontre avec Halima et Joëlle.

Par Anne-Sophie BallePublié le 01/03/2025 à 09h00

image
© Michel Gaillard / RÉA

Sur le bureau d’Halima Bachouche, la pile de dossiers ne diminue pas. Ce serait même plutôt le contraire. C’est que la présidente de la commission logement chez Monoprix (16 000 salariés) reçoit énormément de demandes de collègues en difficulté.

« J’ai 441 dossiers en cours venant de toute la France, et des publics de plus en plus prioritaires. Certains sont victimes de violences ou vivent dans des logements insalubres, d’autres sont déjà à la rue. Les demandes de logement social, temporaire, ont explosé ces dernières années. Il faut trouver des solutions rapides et prioriser les priorités. Humainement, c’est très dur », explique cette militante CFDT.

Les commissions d’information et d’aide au logement (Cial) issues des CSE, sont une obligation dans les entreprises de plus de 300 salariés. Mais leur mission exacte reste méconnue. « Les gens viennent nous voir mais ne connaissent pas les aides auxquelles ils ont droit. »

Chez Allianz (7 000 salariés), Joëlle Blanc fait le même constat : « Nous avons une action menée chaque année à destination des nouveaux entrants, où Action Logement et d’autres partenaires viennent expliquer les dispositifs. Mais les salariés qui ne sont pas concernés ne viennent pas et, quand ils ont besoin d’aide, il est souvent déjà trop tard. Ils se retrouvent noyés », explique cette déléguée syndicale qui pilote la commission logement à l’échelle nationale.

Manque de prérogative

Si la mission d’accompagnement existe toujours, le manque de prérogatives de la commission a eu raison de l’intérêt des militants pour ce type de poste. « Avant, la commission était délibérative. On avait tout un parc de logements, et quand une personne était prioritaire, on trouvait une solution de secours dans le mois. Aujourd’hui, du fait de la législation, le parc ne nous appartient plus en propre. On est de plus en plus dans l’informatif, et de moins en moins en capacité de changer la donne », poursuit Joëlle.

Ces difficultés, couplées à un changement de typologie d’entreprise (passée d’un tiers à deux tiers de cadres en quelques années), ne l’empêchent pas de monter, avec les assistantes sociales, des dossiers de nature très diverse : prêt, conseil en financement mais aussi aides au paiement des loyers pour permettre aux salariés de pouvoir se maintenir dans leur logement. Ce dernier cas représente en moyenne de 15 à 20 dossiers par an.

Chez Monoprix, Halima, de son côté, a permis à 63 collaborateurs d’être relogés l’année dernière. « On a parfois l’impression que c’est une goutte d’eau », soupire-t-elle. Mais elle en est persuadée : sans les commissions logement et ses militants pour les faire vivre, ce serait bien pire.