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Extrait de l’hebdo n°3910
Organisations syndicales et patronales se sont retrouvées le 1er mars pour un dernier tour de table avant de discuter du projet d’accord. Le CDI seniors et le Cetu ont cristallisé les désaccords sans qu’une issue se profile, pour le moment.
Si la négociation « Pacte de la vie au travail » se déroulait plutôt sereinement jusqu’à présent, la séance du 1er mars a marqué une rupture. Une séance « très compliquée », a résumé d’emblée Yvan Ricordeau, chef de file de la délégation CFDT, venu devant la presse à l’issue de la réunion. « Nous pouvons dire que la négociation tient toujours, mais seulement à un fil. » Comme lui, d’autres négociateurs syndicaux sont sortis passablement exaspérés par l’attitude générale du patronat face à leurs revendications (lire l’encadré).
En guise de seul point de convergence, « le Medef a fait une ouverture pour la première fois sur la prise en compte de l’ensemble du parcours du salarié, pour traiter en amont les questions d’usure professionnelle et d’amélioration de la dernière partie de carrière », relève Yvan Ricordeau. Il s’agit notamment de mettre en place des rendez-vous réguliers au sujet des compétences et de l’employabilité des salariés. Autre avancée : la volonté que le dispositif soit adapté aux TPE et que les salariés et les entreprises soient mieux accompagnés sur les questions d’emploi et de compétences. « Quelques rayons de soleil dans une réunion bien grise… », déplore le secrétaire général adjoint de la CFDT.
Un patronat qui refuse obstinément le Cetu
Là où ça coince, selon les organisations patronales, c’est sur le compte épargne-temps universel (Cetu) ; « un élément très dur de la négociation. La CFDT a réaffirmé deux choses : le Cetu permet de donner des perspectives aux salariés et répond aux attentes afin de prendre en compte les différents temps de la vie […] ; les propositions que nous faisons sont simples à gérer et sans impact financier pour les entreprises ». Yvan Ricordeau explique que l’U2P s’est montrée volontaire sur cette question – contrairement au Medef et à la CPME, qui continuent de refuser fermement toute discussion au sujet du Cetu. Et le chef de file CFDT de mettre en garde : « La CFDT a un mandat de négociation avec le Cetu dedans. Si, la semaine prochaine, le projet d’accord ne comporte pas le Cetu, nous nous retournerons vers le Bureau national et nous verrons alors comment nous allons continuer avec ces nouvelles règles du jeu. »
Au rayon des autres points qui fâchent, la proposition patronale du CDI seniors, qui traite surtout la question du retour à l’emploi. « Le cœur du problème et de la discussion n’est pas là, a rappelé Yvan Ricordeau, mais bien la manière dont les seniors peuvent rester en emploi jusqu’à la retraite. »
Unification des dispositifs sous conditions
Concernant les reconversions professionnelles, la CFDT a fait un pas en faveur de l’unification des dispositifs de reconversion, une demande patronale. « Mais seulement si l’objectif est de renforcer le droit à la reconversion et les financements », tempère le chef de file CFDT. « Tout cela marche si le Medef retire son épée de Damoclès, à savoir que le salarié devrait passer par la case licenciement et chômage avant une reconversion. S’il y a la sécurité du contrat de travail, nous pouvons avancer sur l’unification des dispositifs. » Quant à la prévention de l’usure professionnelle, « les organisations patronales ont beau dire que c’est dans le paysage, elles n’avancent rien de concret ».
L’heure de vérité approche
« Nous ne voyons pas d’éléments très importants se dessiner qui pourraient nous faire dire qu’il y aura quelque chose qui fera date », résumait le chef de file CFDT à l’issue de cette négociation. Le prochain rendez-vous des partenaires sociaux aura lieu le 7 mars. Ce doit être la première séance où un projet d’accord sera sur la table, ouvert à la discussion. « L’heure de vérité se rapproche ! »
Le positionnement des autres organisations syndicales
- FO évoque « une séance pour rien […] Les organisations syndicales ont explicité les choses mais les organisations patronales ont fait la lecture de leurs revendications, sans faire un seul pas vers les organisations syndicales. Le ton s’est durci».
- « Pour le moment, nous essayons de poursuite la négociation. Elle se conclura ou pas par une signature de la CGT, mais nous essayons d’aller au bout», a fait savoir Sandrine Mourey, même si « ça ne se passe pas dans un climat serein».
- « Nous cherchons encore les évolutions positives de la part patronale pour les salariés», a affirmé Jean-François Foucard, de la CFE-CGC.
- « Il y a des blocages sur beaucoup de choses. S’ils bloquent sur tout, nous allons négocier sur quoi ?», s’interroge Éric Courpotin, négociateur CFTC, après être parti avant la fin de la séance. « Nous ne fermons pas la porte mais tant que nous n’avons pas vu la trame de l’accord avec ce que le patronat veut mettre dedans, nous parlons dans le vide.»