Mayotte : la convergence sociale ne peut pas attendre

temps de lecture Temps de lecture 4 min

icone Extrait de l'hebdo n°3963

Le 21 avril, Emmanuel Macron a annoncé une loi de programmation pour la refondation de Mayotte d’ici à l’été. Si ce texte promet la “convergence sociale” des droits, la route reste longue.

Par Guillaume LefèvrePublié le 29/04/2025 à 12h00

Ousseni Balahachi est le secrétaire général de la CFDT Mayotte (ici lors d’une interview sur Mayotte La 1ère).
Ousseni Balahachi est le secrétaire général de la CFDT Mayotte (ici lors d’une interview sur Mayotte La 1ère).© Mayotte La 1ère

Quatre mois après le passage du cyclone Chido qui a dévasté Mayotte, le président de la République, Emmanuel Macron, était en déplacement dans l’archipel afin de présenter son projet loi de programmation pour la refondation de Mayotte. Entouré des ministres de l’Outre-mer, de la Santé, de l’Agriculture et du ministre délégué aux Affaires étrangères, il a affiché son intention de « pouvoir donner le cap des prochains mois pour une reconstruction durable de Mayotte » et évoqué une enveloppe de plus de trois milliards d’euros.

“Des années d’inégalités sociales et salariales”

À la parole du chef de l’État, le ministère des Outre-mer a joint le projet de loi qui devrait être soumis au Sénat à partir du 12 mai, puis à l’Assemblée nationale dès le 2 juin. Le document, comprenant 34 articles, aborde la « convergence des droits sociaux » mais aussi la santé, l'éducation, l'agriculture, la reconstruction du territoire, la lutte contre l’immigration clandestine et la lutte contre l’habitat illégal. « Il faut saisir la balle au bond, mais ce n’est qu’une étape, estime le délégué outre-mer à la Confédération, Pascal Catto. Ce n’est pas un projet de loi qui réglera des années d’inégalités sociales et salariales entre la métropole et Mayotte ».

Même son de cloche du côté de la CFDT Mayotte. « Ce projet ne va pas assez loin et assez vite pour relever les défis nécessaires à la reconstruction de “Mayotte autrement”. Il est temps que le gouvernement considère les Mahoraises et les Mahorais comme des citoyens français à part entière et pas des citoyens de seconde zone, tranche son secrétaire général, Ousseni Balahachi. Si on se dirige vers une égalité de droits, que nous revendiquons depuis des années, alors pourquoi attendre encore six ans ? »

De fait, si Emmanuel Macron a bien demandé au préfet de Mayotte de lancer une consultation sur la « convergence des droits » (article 15) avec l’ensemble des organisations syndicales et patronales « pour phaser » des modalités du processus, il garde « au plus tard » l’année 2031 comme date butoir. Soulignons néanmoins qu’une accélération du calendrier reste envisageable pour la CFDT Mayotte eu égard au déroulement des discussions entre les partenaires sociaux.

“Il va falloir que le patronat joue le jeu du dialogue social”

« Il va falloir que le patronat joue le jeu du dialogue social et cesse de freiner des quatre fers », insiste Ousseni Balahachi. Parmi les sujets prioritaires, l’application pleine et entière du code du travail et du code de la Sécurité sociale, mais également la fin du « Smic Mayotte » et son alignement sur le salaire minimum interprofessionnel de croissance de la métropole (article 15).

Parallèlement, et alors que l’article 22 prévoit la transformation de Mayotte en zone franche globale – avec les exonérations et abattements fiscaux que cela implique –, le secrétaire général de la CFDT Mayotte regrette que « ces mesures favorables aux employeurs ne s’accompagnent pas de contreparties en matière d’emploi ou favorables aux travailleurs ».

La place des services publics en question

À propos de l'auteur

Guillaume Lefèvre
Journaliste

Enfin, la CFDT souligne le peu de place laissé aux services publics, au premier rang desquels la santé. « C’est un parcours du combattant pour se faire soigner. Nous sommes confrontés à la problématique des déserts médicaux, d’un manque de spécialistes et de personnels ; il faut une stratégie volontariste et des actes », résume Ousseni Balahachi. Si les services publics ne sont pas complètement absents du document gouvernemental, qui entend renforcer « l’attractivité » du territoire pour les agents (articles 28 et 29), leur relégation au second plan témoigne du chemin qu’il reste à parcourir pour parvenir à une égalité réelle.