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Extrait de l'hebdo n°3962
Le Premier ministre a convoqué un premier “comité d’alerte sur le budget” le 15 avril, avec l’objectif d’établir un constat commun. Les organisations syndicales et patronales, dont la CFDT, étaient présentes. Si les grandes orientations du budget 2026 ne seront connues qu’en juillet, François Bayrou a martelé que les impôts ne seront pas augmentés.

La phrase s’affiche en grand, tel un mantra, derrière et au-dessus des deux pupitres dressés à la tribune : « La vérité permet d’agir ». Le mardi 15 avril, le Premier ministre, François Bayrou, a convoqué un premier « comité d’alerte sur le budget » en réunissant ministres, élus, collectivités territoriales mais aussi organisations syndicales et patronales pour un exercice de « vérité » sur la situation des finances publiques et de l’économie française. Et ce, 48 heures après que le ministre de l’Économie, Éric Lombard, a annoncé qu’il faudra fournir un « effort » de 40 milliards d’euros dans le cadre du budget 2026 afin que le déficit public de la France passe de nouveau sous la barre des 5 % de PIB.
Entre les trop et les pas assez…
Selon le Premier ministre, « c’est de cette seule confrontation [avec] le réel, si incommode qu’il soit […], que pourront naître les orientations d’avenir pour le pays ». « Nous devons mesurer la gravité de la situation », a-t-il ajouté. Et de se lancer dans un tableau peu reluisant de la situation française. Le PIB ramené par habitant est inférieur à celui de nos voisins européens ou à celui des États-Unis ; notre déficit commercial est élevé ; les dépenses publiques sont trop importantes par rapport à nos dépenses ; la dette augmente trop rapidement… « Si notre production par habitant était dans la même gamme que celle de nos voisins européens, nous n’aurions plus de déficit budgétaire. […] Nous ne produisons pas assez et il n’y a aucune raison acceptable pour un tel retard », estime François Bayrou. Qui dit production dit emploi, et, sur ce terrain-là, « nous ne sommes pas assez à travailler », relève celui qui est également maire de Pau (Pyrénées-Atlantiques), insistant sur le fait qu’il faut améliorer le taux d’emploi des jeunes et des seniors.
Malgré ces constats, le Premier ministre écarte d’emblée deux pistes : augmenter les impôts et emprunter toujours plus – alors que la charge de la dette pour 2025 (62 milliards d’euros) avoisine le budget de l’Éducation nationale (63 milliards d’euros hors pensions). Le gouvernement préfère choisir les quatre voies suivantes : conserver la trajectoire financière en ce qui concerne la sécurité et la défense ; désendetter ; « refonder l’action publique » avec une remise à plat des politiques, dont les conclusions sont attendues pour mai ; enfin, « garantir la vitalité économique de notre pays » par un soutien à l’innovation, une simplification administrative et un accent mis sur la formation des personnes. « Nous devons travailler plus, davantage et mieux », a appuyé Astrid Panosyan-Bouvet, la ministre chargée du Travail et de l’Emploi.
“Une vision court-termiste et comptable”, dénonce la CFDT
Selon Marylise Léon, qui représentait la CFDT au comité d’alerte qui a précédé la conférence de presse de François Bayrou, « c’est bien de regarder comment le budget 2025 se déroule, mais l’important, c’est ce qui se passera pour 2026. Il faut de la justice sociale, sortir des dogmes et travailler sur un impôt plus juste. C’est vraiment fondamental pour la CFDT ». « On nous dit que l’on est dans une situation exceptionnelle, d’urgence. J’attends que le gouvernement m’explique pourquoi il ne change pas d’avis sur la question de l’augmentation des impôts », a ajouté la secrétaire générale. Et de conclure : « On est dans une vision très court-termiste et comptable. La société ne fonctionne pas en tableur Excel. » La CFDT fera donc part de ses propositions.
Reste à savoir quelle sera la méthode de travail retenue. Côté calendrier, si le gouvernement promet des échanges avec les parlementaires, les collectivités territoriales et les partenaires sociaux (entre autres dans le cadre de l’ouverture de nouveaux chantiers pour les 80 ans de la Sécurité sociale), un deuxième comité d’alerte doit avoir lieu en juin prochain, et les grandes orientations du budget 2026 devraient être annoncées vers la mi-juillet. Un « feuilleton » sur le budget semble se dessiner…