L’indispensable réforme des bourses étudiantes

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icone Extrait de l'hebdo n°3962

Alors que la précarité étudiante n’a jamais été aussi criante, la réforme du système des bourses sur critères sociaux ne cesse d’être repoussée. La CFDT et la Fage s’impatientent et demandent des mesures structurelles immédiates.

Par Anne-Sophie BallePublié le 22/04/2025 à 12h00

Près de 20 % des étudiants ne mangent pas à leur faim, selon une étude réalisée par la Fage en janvier 2024 (ici, distribution de produits alimentaires et d’hygiène sur le campus de l’université de Picardie Jules-Verne, à Amiens, en février 2024).
Près de 20 % des étudiants ne mangent pas à leur faim, selon une étude réalisée par la Fage en janvier 2024 (ici, distribution de produits alimentaires et d’hygiène sur le campus de l’université de Picardie Jules-Verne, à Amiens, en février 2024).© CFDT

Depuis l’élection présidentielle de 2017, Emmanuel Macron affirme être le président des jeunes. Les chiffres, eux, auraient plutôt tendance à prouver le contraire : entre 2017 et 2024, le coût de la vie des étudiants a augmenté de 25,5 % tandis que le nombre de boursiers, lui, a baissé de 73 000 – atteignant ainsi le même nombre qu’en 2014 (soit 679 000). La baisse des APL1, en juillet 2017, avait été le premier signe d’un mépris de l’exécutif pour la jeunesse… suivi par des promesses non tenues, au premier rang desquelles la réforme des bourses étudiantes.

Annoncé en grande pompe en mars 2023, le volet « structurel » de ce chantier (il vise notamment à réformer le système d’attribution des bourses) devait d’abord aboutir en 2024, puis en 2025. Il est désormais reporté à la rentrée 2026… Le gouvernement justifie cet énième report par un « besoin de visibilité et de lisibilité ». Les étudiants, dont la précarité alimentaire explose, apprécieront.

Six millions de repas distribués

De fait, plus d’un tiers des bénéficiaires de l’aide alimentaire en France sont des jeunes de moins de 35 ans. « Nous avons tous en tête ces images de files d’attente d’étudiants devant les distributions alimentaires pendant la crise Covid. Elles n’ont pas disparu depuis », assure la Fage2. Les épiceries sociales et solidaires étudiantes viennent de franchir le seuil des 6 millions de repas distribués. « Or 70 % des bénéficiaires ne sont pas éligibles aux bourses sur critères sociaux, révélant un système inefficace qui doit être réformé en urgence », expliquent la CFDT et la Fage dans un communiqué commun.

Concernant la réforme, une concertation devrait être menée dans les prochaines semaines avec les organisations syndicales et le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Elle doit, selon ces deux organisations, garantir un droit ouvert à chacun et considérer l’étudiant en dehors de son foyer familial. En effet, le dispositif actuel étant fondé sur des critères sociaux familiaux, il limite (voire pénalise) de nombreux étudiants en ne favorisant pas leur autonomie et leur émancipation. Les propositions de la CFDT – portées également par la Fage – sont claires : il faut d’abord « supprimer les échelons et linéariser le système ». Une proposition en ce sens avait déjà été faite en 2023, au moment de l’annonce de la réforme. Elle avait été saluée par la fédération étudiante en cela qu’elle permettait de « mettre fin aux effets de seuil ».

Le besoin d’une réforme systémique

À propos de l'auteur

Anne-Sophie Balle
Rédactrice en chef adjointe de Syndicalisme Hebdo

Plus largement, CFDT et Fage demandent une revalorisation des montants attribués et une indexation des barèmes d’attribution des bourses sur l’inflation, ainsi qu’un accroissement du nombre de boursiers. Depuis 2014, le nombre d’étudiants dans l’enseignement supérieur a augmenté de 17 % quand le nombre d’apprentis, lui, a explosé depuis 2021 sous l’effet de l’aide à l’embauche proposée aux entreprises. Or étant en apprentissage, ces étudiants salariés ne peuvent plus bénéficier des bourses sur critères sociaux. « Une amélioration des dispositifs pour les étudiants non éligibles aux bourses serait donc, aussi, la bienvenue », affirment les deux organisations, qui rappellent que « les pouvoirs publics doivent garantir à chacun le droit d’étudier dans des conditions dignes ».