Les partenaires sociaux reçus à Matignon

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iconeExtrait de l’hebdo n°3948

Quelques jours avant son discours de politique générale, le Premier ministre François Bayrou a rencontré les leaders syndicaux et patronaux. La CFDT demande trois rendez-vous urgents concernant l’emploi, le travail et les retraites.

Par Anne-Sophie Balle— Publié le 09/01/2025 à 15h58

La délégation CFDT – composée, de gauche à droite, par Isabelle Mercier (secrétaire nationale), Yvan Ricordeau (secrétaire général adjoint), Jocelyne Cabanal (secrétaire nationale) et Marylise Léon (secrétaire générale) – a été reçue le mardi 7 janvier à Matignon par François Bayrou.
La délégation CFDT – composée, de gauche à droite, par Isabelle Mercier (secrétaire nationale), Yvan Ricordeau (secrétaire général adjoint), Jocelyne Cabanal (secrétaire nationale) et Marylise Léon (secrétaire générale) – a été reçue le mardi 7 janvier à Matignon par François Bayrou.© Syndheb

Comme une ritournelle à laquelle s’adonnent les nouveaux locataires de Matignon, François Bayrou a entamé, le 7 janvier, une large consultation des partenaires sociaux en amont de son discours de politique générale, prévu le mardi 14 janvier. Cette prise de contact doit permettre au Premier ministre d’« entendre les demandes » des organisations syndicales et patronales et d’évoquer avec elles « l’actualité sociale », précisent les services de Matignon. Pour la CFDT, elle fût l’occasion de « poser un certain nombre d’exigences sur plusieurs rendez-vous urgents », rappelait Marylise Léon à sa sortie.

Dans une situation économique « plus qu’inquiétante », la secrétaire générale de la CFDT demande avant toute chose qu’un premier rendez-vous relatif à l’emploi soit fixé très rapidement. Face aux menaces fortes qui pèsent sur l’emploi, les travailleurs dont les emplois sont supprimés ou menacés doivent être accompagnés, plaide Marylise Léon : « Les reconversions professionnelles ne devraient pas systématiquement passer par une rupture du contrat de travail. Nous pouvons faire beaucoup mieux pour maintenir les compétences et sécuriser les travailleurs. »

La valeur du travail

Le deuxième rendez-vous que la CFDT appelle de ses vœux concerne le travail. « On parle beaucoup de la valeur travail, estime Marylise Léon. Mais il serait temps que les employeurs du privé comme du public reconnaissent la valeur du travail à travers une meilleure rémunération, de bonnes conditions de travail, une prévention des risques à la hauteur et un peu moins de verticalité dans les décisions sur les lieux de travail. Les attentes sont fortes. » Or, depuis la conférence sociale de l’automne 2023, « on attend toujours cette dynamisation promise de la négociation, notamment dans les branches professionnelles, sur les classifications et les évolutions de carrière », assène-t-elle.

L’incontournable sujet des retraites

Enfin, un troisième rendez-vous doit avoir lieu sur les retraites, estime la CFDT. Alors que son gouvernement était en cours de formation, François Bayrou avait reçu courant décembre à Matignon les chefs de partis et de groupes politiques, promettant de « reprendre sans suspendre » la réforme reportant l’âge légal de départ de 62 à 64 ans et de travailler à l’élaboration d’un nouveau texte. Naturellement, le sujet est donc revenu sur la table au moment des échanges bilatéraux avec les partenaires sociaux. La CFDT, de son côté, pose un incontournable à ces discussions : ouvrir le sujet de la reconnaissance de la pénibilité. « C’était l’un des enjeux de la mobilisation retraite en 2023 ; cela ne s’est pas évanoui avec la nouvelle année 2025 », affirme Marylise Léon. Sur ce point précis, le Premier ministre a confirmé qu’il n’y aurait « pas de tabou et que toutes les thématiques afférentes aux retraites, y compris l’âge légal, étaient sur la table ». Fidèle à sa ligne, la CFDT jugera sur pièces.

Besoin de stabilité

À propos de l'auteur

Anne-Sophie Balle
Rédactrice en chef adjointe de Syndicalisme Hebdo

Que retiendra, in fine, François Bayrou de cette vaste consultation et des propositions des uns et des autres dans son discours de politique générale ? Difficile, pour l’heure, de se faire une idée précise. Avec ces entrevues, François Bayrou avait néanmoins un message de forme à faire passer : en l’occurrence, ne pas rompre d’emblée le fil du dialogue fragilement renoué par son prédécesseur, Michel Barnier. Le maintien d’Astrid Panosyan-Bouvet au poste de ministre du Travail est sans doute un gage de continuité donné par le Premier ministre aux partenaires sociaux. Mais il ne suffira pas à mettre fin à « l’instabilité dans laquelle a basculé notre pays au lendemain de la censure », écrivaient les partenaires sociaux dans une déclaration commune publiée le 17 décembre dernier. Une instabilité qui « fait peser sur nous le risque d’une crise économique aux conséquences sociales dramatiques ». Les réponses à cette crise devront être à la hauteur. L’avenir du pays en dépend.

Quels messages portés par les autres organisations ?

CGT
Face à « la gravité de la situation sociale, économique et démocratique du pays », Sophie Binet demande la tenue d’une « table ronde à Matignon réunissant l’ensemble des acteurs sociaux pour prendre des mesures d’urgence en matière d’emploi et d’industrie », et la mise en place d’un « moratoire sur les licenciements » dans la période.

FO
Tout en continuant à demander l’abrogation de la réforme des retraites, Frédéric Souillot appelle, dans le cadre des discussions à venir, à « prendre les choses par le bon bout, c’est-à-dire pas en ne parlant ni de recul de l’âge ni de l’allongement de la durée de cotisation […] Parlons de l’emploi des 55-64 ans et demandons la transposition de l’accord seniors avec la retraite progressive dès 60 ans ».

Medef
Patrick Martin se dit prêt à « une discussion sur l’aménagement de la dernière réforme des retraites », à condition que « cela ne se traduise pas par un alourdissement du coût du travail ». De manière plus globale, il appelle à « faire levier de ces travaux qui s’engageraient sur la réforme des retraites pour poser beaucoup plus fondamentalement le sujet du niveau et du financement de notre protection sociale ».

CPME
François Asselin appelle à « des réformes structurelles de fond de notre système social » pour sortir de la crise car, selon lui, « ce ne sont pas des mesures ponctuelles d’augmentation de tel ou tel impôt qui feront que la France remontera la pente ». En matière budgétaire, il s’agit de « faire attention à l’évolution de la fiscalité [pour] préserver les PME, si la courbe des allègements de charges devait être redessinée ».