La ministre du Travail déroule sa feuille de route pour les prochains mois

temps de lecture Temps de lecture 5 min

icone Extrait de l'hebdo n°3960

Transparence salariale, RSA, métiers en tension, reconversions professionnelles… Devant l’Ajis (Association des journalistes de l’information sociale), Astrid Panosyan-Bouvet a fait un point d’étape concernant les chantiers de son ministère.

Par Anne-Sophie BallePublié le 08/04/2025 à 15h04

image
© Thierry Nectoux

Elle était très attendue, ce 3 avril, la ministre du Travail. Devant une cinquantaine de journalistes de l’information sociale, Astrid Panosyan-Bouvet a évoqué un à un les nombreux dossiers posés sur son bureau au ministère… tout en insistant sur « la place à laisser aux partenaires sociaux et au dialogue social » dans le traitement de ces sujets. Parmi les priorités, on retrouve notamment la négociation relative aux reconversions professionnelles, qui devrait s’ouvrir « dans les tout prochains jours », affirme la ministre.

Le sujet a déjà fait l’objet de discussions, en 2024, entre les partenaires sociaux, mais il s’était soldé par l’échec de la négociation Pacte de la vie au travail ; avant d’être partiellement repris sous la forme d’une « période de reconversion » imaginée par la CFDT, la CFTC, la CFE-CGC et FO côté syndical, et l’U2P côté patronal. La future négociation pourrait donc s’appuyer sur cette base pour approfondir les discussions, que la ministre aimerait voir aboutir d’ici au mois de juin, afin de « l’intégrer dans la transposition des accords nationaux interprofessionnels de l’assurance chômage, des seniors et des mandats syndicaux ». Cela ne laisserait concrètement que deux mois aux partenaires sociaux pour trouver une voie de passage…

Immigration : la liste des métiers en tension bientôt publiée

Autre sujet brûlant d'actualité : l’actualisation de la liste des métiers en tension devant servir à la régularisation des travailleurs sans papiers, région par région. Le sujet avait provoqué l’émoi du côté des syndicats et des associations au moment de la transmission du texte aux partenaires sociaux, à la fin février 2025. Cette nouvelle liste devrait paraître avant la fin avril, prévient la ministre du Travail, qui a salué « la concertation menée avec les partenaires sociaux, les régions et les Crefop1, dans une logique de croisement des données sur les métiers en tension et le taux de participation des étrangers hors Union européenne à ces métiers ». La CFDT, quant à elle, continue de dénoncer une politique migratoire de plus en plus restrictive et déconnectée des réalités économiques.

Rémunérations : l’aspiration à une révolution culturelle

S’agissant des rémunérations, la transposition de la directive européenne sur la transparence salariale devrait être finalisée en septembre et engendrer une « révolution culturelle », estime la ministre, car « les offres devront être plus précises en termes d’offre de rémunération, de fourchette [et être] assorties d’une interdiction pour un recruteur de demander la rémunération actuelle, ce qui ne peut jouer qu’en faveur des femmes ». Elle dit attendre un certain nombre d’avancées dans le cadre de la concertation avec les partenaires sociaux, qui doit encore traiter, entre autres points, de la question du seuil d’application de la directive, fixé à 100 salariés.

En matière de salaires, la ministre précise qu’elle suit avec attention les NAO2 dans les entreprises qui affichent de très bons résultats mais où les négociations demeurent « poussives ». Concernant les minima conventionnels, elle rappelle que « quatre branches sont structurellement en situation de non-négociation [foyers des jeunes travailleurs, distribution directe, hospitalisation privée et prestations de services du secteur tertiaire] quand une dizaine d’autres sont confrontées à des difficultés de négociation ».

RSA : des logiques opposées

À propos de l'auteur

Anne-Sophie Balle
Rédactrice en chef adjointe de Syndicalisme Hebdo

Très décriée ces derniers mois, la réforme du RSA a acté, depuis le 1er janvier 2025, l’obligation pour les allocataires d’effectuer quinze heures d’activité hebdomadaires sous peine de voir leur allocation suspendue. Ces derniers jours, la tension est montée d’un cran alors qu’un décret de sanction – intitulé « suspension-remobilisation » et pénalisant les allocataires qui ne respecteraient pas cette nouvelle obligation – doit être publié le 1er juin… Le risque est double, estime la CFDT : provoquer une défaillance de l’accompagnement social et faire basculer dans la pauvreté des personnes déjà en situation de grande précarité. La ministre s’en est défendue devant les journalistes de la presse sociale, estimant que « les sanctions ont toujours existé. Avec ce nouveau barème, nous redonnons la main aux conseils départementaux et aux agents de France Travail pour quelque chose de plus progressif, modulaire et provisoire »… avant de préciser que le décret prévoit sept niveaux de sanction correspondant à la suppression de 30 à 100 % de l’allocation. L’inflexion espérée par les mouvements associatifs et les organisations syndicales n’a donc pas eu lieu, conduisant ces derniers à renouveler leur appel à signer la pétition d’ATD Quart Monde.