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Extrait de l’hebdo n°3952
À l’instar d’autres organismes, l’Agence de la transition écologique est la cible d’attaques visant à décrédibiliser son action. La CFDT, première organisation syndicale avec 46 % des voix, rappelle le rôle stratégique de l’Ademe et l’importance de ne pas abîmer cet outil d’expertise de la transition écologique, si précieux dans la période.
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1. Agence française pour le développement et la promotion de l’agriculture biologique.
Cela fait des semaines que ça dure. Des mois, même, que l’Agence de la transition écologique, créée en 1990, est sous le feu de critiques visant à décrédibiliser son action et à mettre en doute son efficacité. Plusieurs personnalités politiques sont ainsi montées au créneau et ont vilipendé ces opérateurs « à l’origine des normes qui épuisent notre pays et aboutissent à déposséder le politique de la décision », selon l’expression du président du groupe LR à l’Assemblée, Laurent Wauquiez. Cette vindicte percute également d’autres structures telles que l’Agence bio1 (récemment menacée par un amendement sénatorial, finalement retiré) ou l’Office français de la biodiversité (OFB). « Nous sommes la cible d’une attaque anti-transition, et cela affecte particulièrement les salariés », résume Olivier Théobald, délégué syndical CFDT de l’Ademe, qui travaille à la direction de l’économie circulaire.
Amalgames autour du budget
2. Sur les 28 élus au CA, six places sont réservées aux représentants salariés, dont trois à la CFDT.
« Ces accusations injustes et injustifiées nous mettent en colère », s’exclame Jérôme Dancoisne, élu CFDT au conseil d’administration2 et directeur régional adjoint de l’Ademe Bretagne. Les amalgames faits entre nos « 1 100 équivalents temps plein » et les « 4 milliards d’euros de l’Ademe » font notamment bondir les militants. « Le budget de l’Ademe, qui s’élève à 3,5 milliards d’euros, est à 92 % de l’argent public que l’on redistribue pour financer des projets d’accompagnement des collectivités et des entreprises dans la transition écologique. Ce n’est en aucun cas notre budget de fonctionnement, qui est de 135 millions d’euros », rappelle avec force Rachel Baudry, administratrice au conseil d’administration de l’Agence.
« Quant aux accusations sur notre utilisation de l’argent public, on peut en parler. Nous avons fait l’objet d’une inspection de la part de l’Inspection générale des finances, au printemps 2024, qui a conclu que l’Ademe était globalement bien gérée. Quand on connaît le vocabulaire de l’IGF, cela a valeur de compliment. Le rapport recommande même de poursuivre la hausse des effectifs », fait valoir Olivier.
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« Contrairement à ce que prétendent certains, nous ne faisons pas que distribuer des subventions ! », tient à préciser Jérôme, qui détaille tout l’accompagnement qui est effectué : « Avant l’émergence des projets, on stimule la demande, on va rencontrer les acteurs des collectivités, on réfléchit ensemble. On engage ensuite des études pour s’assurer de la bonne technologie au bon endroit. Idem avec les entreprises porteuses de projet : on les challenge, on analyse leur demande. » L’expérience tirée du terrain vient ainsi enrichir l’expertise concentrée au niveau du siège (où travaillent 500 salariés, soit près de la moitié des effectifs, des experts très pointus sur tous les sujets liés à la transition écologique) selon un mode opératoire unique.
« C’est la force de notre modèle : nous développons des outils et des méthodologies qui se nourrissent des retours d’expérience de nos directions régionales, qu’elles diffusent très largement », explique Jérôme. Cette expertise, reconnue par l’État, « est d’ailleurs utilisée dans les ministères pour guider les évolutions législatives », ajoute Rachel. Tout le monde a ainsi en tête les scénarios de transition de l’Ademe ou d’autres études prospectives qui servent la réflexion et l’action de tous les acteurs, entreprises, collectivités, associations et ONG.
Des craintes au sujet de l’emploi
Cette expertise sert également d’accélérateur de la transition écologique, expliquent les militants : « Le Fonds chaleur a coûté 4,3 milliards d’euros depuis quinze ans mais il a évité l’importation de gaz à hauteur de 1 à 4 milliards d’euros par an. C’est utile pour le climat et c’est un bon investissement financier. » Selon eux, une baisse des moyens ou des capacités d’action de l’Ademe risquerait d’entraîner pour l’État une perte de compétences uniques sur les sujets environnementaux. Avec, par effet domino, des craintes au sujet de l’emploi.
Si, dans l’immédiat, les effectifs CDI ne sont pas directement menacés, les militants craignent toutefois que les baisses de crédits affectent, à plus ou moins long terme, les intérimaires, qui représentent 20 % des effectifs. « Avec un risque de report de charge sur les salariés », évoque Olivier. Un engrenage que les militants veulent à tout prix éviter… mais avec quels moyens lutter ou se faire entendre ? « Faire grève serait inutile. Une grève du zèle le serait tout autant. Cela nuirait même aux projets et aux personnes que nous accompagnons. Il nous reste à gagner leur soutien, à convaincre de l’enjeu à conserver “l’outil Ademe” », conclut Olivier.
Ces soutiens sont de plus en plus nombreux, et plusieurs pétitions circulent, comme celle qu’ont signée Marylise Léon, secrétaire générale de la CFDT, et Mylène Jacquot, secrétaire générale de la CFDT Fonctions publiques, intitulée « Pour accompagner nos agriculteurs face aux crises environnementales, protégeons l’Ademe, l’OFB et l’Agence bio ». Il faut que ces pétitions gagnent en écho.