Maintenant, quel avenir pour Mayotte ?

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iconeExtrait de l’hebdo n°3948

Il y a un mois, le cyclone Chido s’abattait sur le territoire mahorais, ravageant tout sur son passage. Un bilan provisoire fait état d’une quarantaine de morts, d’autant de disparus et de milliers de blessés. Alors que l’île panse ses plaies, il y a urgence, selon la CFDT et la CFDT Mayotte, à répondre aux besoins vitaux de la population et à reconstruire Mayotte “autrement”.

Par Guillaume Lefèvre— Publié le 14/01/2025 à 13h00

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© Sergey Ponomarev/The New York Times/Redux-RÉA

« Nous sommes face à une montagne de défis », alerte Ousseni Balahachi, le secrétaire général de la CFDT Mayotte. Un mois tout juste après que les vents ont balayé le 101e département français et presque tout détruit sur leur passage, le syndicaliste égrène les priorités sanitaires (accès à l’eau, à l’alimentation…), techniques (remise en place du réseau d’électricité et de communication), mais aussi économiques et sociales. L’accompagnement des travailleurs par la mise en place de mesures de soutien et de relance, la réduction des inégalités et de la précarité ou encore la remise en marche des services publics et l’accès à l’éducation sont vitaux pour le territoire. Initialement prévue le 6 janvier, la rentrée scolaire a été reportée au 13 janvier pour les personnels et au 20 janvier pour les élèves.

Ce timing a été jugé trop précipité par l’intersyndicale locale, qui a déposé un préavis de grève illimité dès le 13 janvier. « Le bâti scolaire est en partie détruit. Si nous sommes conscients et désireux que nos élèves reprennent une scolarité normale, ce ne peut être à n’importe quelles conditions, et certainement pas en mettant les personnels et les élèves en danger », rappelle le syndicat CFDT de l’académie de Mayotte. 

Penser une rentrée, oui. Penser à la rentrée, non

« Penser une rentrée, oui. Penser à la rentrée, non », insiste pour sa part Catherine Nave-Bekthi, la secrétaire générale de la CFDT Éducation Formation Recherche publiques, qui a pu rappeler les inquiétudes des personnels lors d’une réunion avec la ministre de l’Éducation nationale, Élisabeth Borne, le 9 janvier. « La ministre a reconnu les difficultés et a conscience de la situation. Le calendrier de la rentrée devrait donc être desserré, afin que le retour et l’accueil se fassent dans les meilleures conditions possibles. »

Revoir collectivement le modèle économique et social du territoire

Tous ces défis, la CFDT Mayotte les a également longuement exposés au cabinet du Premier ministre lors de sa venue sur l’île, le 29 décembre 2024. « Les forces sociales et la société civile joueront un rôle clé pour construire un nouveau projet de territoire. Mais il est temps de penser à reconstruire Mayotte autrement », insiste Ousseni Balahachi.

De son côté, la Confédération n’a pas manqué, à travers le dossier qu’elle a remis au Premier ministre, François Bayrou, le 7 janvier dernier, de pointer la nécessité d’articuler urgence sociale et changement de paradigme. « Il faut d’abord répondre aux besoins vitaux d’accès à l’eau, à l’électricité, à l’alimentation, à la mobilité et à la sécurité. Cet épisode vécu par le territoire de Mayotte doit ensuite nous inciter collectivement à revoir son modèle économique et social. »

Le projet de loi d’urgence au Sénat à la fin janvier

Si les vingt-deux articles du projet de loi d’urgence pour Mayotte (présenté le 8 janvier en Conseil des ministres) apportent de premières réponses afin de sortir du chaos (prolongation des droits des assurés sociaux et des chômeurs, augmentation de la prise en charge au titre du chômage partiel, le tout jusqu’au 31 mars 2025…), il faudra aller plus loin, estime la CFDT Mayotte. « Les Mahorais et les Mahoraises ne doivent plus être des citoyens de seconde zone ; ils doivent bénéficier des mêmes droits que l’ensemble des citoyens du pays », martèle Ousseni Balahachi, selon qui la solution passe, entre autres, par la convergence des droits et la fin des codes spécifiques à Mayotte, tels ceux de la santé publique ou de la Sécurité sociale. « Mayotte doit être un territoire où l’égalité des droits devient une réalité ! »

Le projet de loi d’urgence pour Mayotte, qui pare au plus pressé, devrait être suivi du plan « Mayotte debout » dans les prochaines semaines. À travers ce texte, le gouvernement fait connaître son ambition de « redéfinir l’avenir de l’archipel ». La CFDT Mayotte espère évidemment qu’il ne s’agit pas d’un simple effet d’annonce, au risque d’un dangereux immobilisme et d’un dramatique statu quo.

Appel à la grève illimitée au centre hospitalier

À propos de l'auteur

Guillaume Lefèvre
Journaliste

C’est d’ailleurs parce qu’ils alertent depuis des mois – en vain – sur la dégradation de leur qualité de vie et de leurs conditions de travail que la CFDT et l’intersyndicale du Centre hospitalier de Mayotte (« la plus grande maternité de France ») ont appelé les personnels à une grève illimitée à partir du 13 janvier. Dans son sillage, le cyclone Chido n’a fait qu’exacerber les difficultés auxquelles le personnel soignant de l’hôpital est confronté. « Nous alertons sur le mal-être des personnels, leurs souffrances et un sentiment de persécution », écrivent les quatre organisations syndicales présentes au sein du CHM, dénonçant « une perte de repères sur l’organisation du travail et ses conditions et une qualité de vie au travail dégradée ».

La CFDT appelle à la solidarité avec la CFDT Mayotte

Pour faire face à l’urgence humanitaire, la Confédération, en collaboration avec la CFDT Mayotte, a organisé un appel aux dons en partenariat avec la Fondation de France.
Outre la participation à cette cagnotte, les structures CFDT qui le souhaitent sont invitées à soutenir financièrement la CFDT Mayotte, dont les locaux ont subi de gros dégâts. Plusieurs militantes et militants se trouvent également dans une situation très précaire. Il est possible d’envoyer directement par virement des dons sur le compte de l’Union interprofessionnelle CFDT Mayotte. Pour toutes demandes et informations complémentaires, écrire à Pascal Catto, pcatto@cfdt.fr.