En Nouvelle-Calédonie, le chaos, partout

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iconeExtrait de l’hebdo n°3931

Le 31 août, les 1 200 salariés de l’usine de Koniambo Nickel SAS ont été licenciés. Un nouveau coup dur pour les travailleurs, la cohésion sociale et l’économie d’un territoire complètement à l’arrêt depuis trois mois et le début des émeutes, qui ont déjà fait dix morts.

Par Guillaume Lefèvre— Publié le 03/09/2024 à 12h00

Vue de l’usine de nickel Prony Resources, l’un des trois grands métallurgistes de Nouvelle-Calédonie.
Vue de l’usine de nickel Prony Resources, l’un des trois grands métallurgistes de Nouvelle-Calédonie.© Adam Dean/Panos-RÉA

1. Union des syndicats ouvriers et employés de Nouvelle-Calédonie.

2. Fédération des entreprises des outre-mer.

« Nous sommes face un effondrement total de notre territoire. À tous les niveaux, alerte Jean-Marc Burette, secrétaire général de l’Usoenc1, organisation syndicale partenaire de la CFDT. Un salarié sur deux a perdu son emploi, le système de santé se voit mis à mal avec le départ de dizaines de soignants, les dispensaires ferment, aucun transport public terrestre ne circule. De son côté, le gouvernement calédonien et les collectivités territoriales n’ont aucune marge de manœuvre financière et de grosses inquiétudes pour les salaires des agents publics. » Dans le secteur privé, près de 900 entreprises ont périclité et 24 000 emplois auraient été détruits, selon la Fedom2. Le PIB calédonien aurait quant à lui diminué de 24 %…

Parallèlement à cette situation dramatique, l’Institut de la statistique et des études économiques (ISEE) annonçait en juillet dernier une inflation record et une hausse des prix de l’alimentaire de 3,7 %. Une première depuis plus de trente ans.

« Nous sommes face à une bombe sociale, poursuit Jean-Marc Burette. Le pouvoir d’achat n’est malheureusement plus un sujet parce qu’il n’y a plus d’argent. On constate une hausse des impayés des loyers et factures. Si on n’agit pas rapidement, les gens auront faim… La peur est en train de s’installer. Les gens ne se projettent plus et ne croient plus en l’avenir. »

La longue attente d’un gouvernement de plein exercice

Selon l’Usoenc, il est indispensable que l’État français apporte des aides financières à la survie sociale et économique du territoire et agisse pour garantir la sécurité des biens et des personnes. « On ne pourra pas reconstruire le pays si on ne résout pas ce problème ! » À ce titre, l’organisation syndicale néo-calédonienne déplore la vacance du pouvoir et l’absence d’interlocuteurs depuis plusieurs semaines alors même qu’en mai dernier, Emmanuel Macron avait snobé les organisations syndicales lors de sa venue à Nouméa.

« Nous attendons impatiemment que soit nommé un gouvernement de plein exercice qui se mette au travail et prenne le sujet à bras-le-corps. L’État doit donner l’impulsion nécessaire, mobiliser tous les acteurs et les mettre en action, explique Béatrice Lestic, secrétaire nationale de la CFDT chargée de l’outre-mer. Des décisions budgétaires devront également être prises rapidement afin d’éviter que la situation sur place ne continue de se dégrader. »

Le dialogue social reste une voie de passage essentielle

« Le dialogue social reste par ailleurs une voie de passage essentielle pour agir sur un certain nombre de sujets comme le travail et l’emploi », précise Béatrice Lestic. Des sujets qui ont pu être abordés par la CFDT avec certains de ses homologues du patronat. « Nous devons voir comment il est possible de trouver ensemble des solutions à la crise et à l’après-crise. »

À propos de l'auteur

Guillaume Lefèvre
Journaliste

Malgré l’ampleur de la tâche et des chantiers à venir, Jean-Marc Burette ne baisse pas les bras : « Le bout du tunnel existe forcément, même si nous ne le voyons pas encore. Nous ferons tout pour sortir de cette crise par le haut. Elle doit être une opportunité qui permette de défendre le modèle que nous voulons, plus juste, plus social et plus égalitaire. »