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Grand scrutin pour très petites entreprises
Les accords se sont multipliés après la pandémie de Covid en faveur des salariés de l’hôtellerie-restauration. Salaires, formation, santé… Il y avait urgence après plusieurs années de disette.
« Il a fallu le Covid pour que les organisations patronales se bougent. » Stéphanie Dayan, secrétaire nationale de la Fédération CFDT des Services chargée de la branche des hôtels-cafés-restaurants, se souvient d’un temps pas si lointain où il ne se passait pas grand-chose lors des négociations. Pourtant, dans ce secteur, 84% des entreprises sont des TPE et elles emploient la moitié des salariés de la branche, soit environ 380000 personnes. La branche est donc un échelon crucial pour améliorer les conditions de travail et les salaires de ces travailleurs.
« Après le confinement, les employeurs se sont rendu compte que de très nombreux salariés [environ 100 000] avaient quitté le secteur pour aller se former, changer de voie, créer leur entreprise, rappelle Stéphanie. Alors ils se sont un peu creusé la tête pour comprendre le mal-être : les bas salaires, les mauvaises conditions de travail, la maltraitance physique et verbale, les coupures [les heures de pause non rémunérées entre deux services]… Nous leur avons fait comprendre qu’il fallait faire quelque chose. »
Fin 2021, un accord a permis de revaloriser les salaires minimaux de 16,33 % en moyenne.
Garantir de meilleures rémunérations
Les partenaires sociaux ont donc commencé par les rémunérations. À la fin 2021, un accord a permis de revaloriser les salaires minimaux de 16,33 % en moyenne. Une révision de la grille conventionnelle bienvenue, alors que de nombreux niveaux se trouvaient sous le Smic depuis le dernier accord, en 2018. Maintenant, tous les ans, les partenaires sociaux trouvent un accord pour revaloriser la grille.
En 2022, la négociation sur les classifications a pu aboutir, après cinq ans de discussions. La précédente classification des métiers, qui datait de 1997, n’était plus adaptée. « Certains métiers avaient disparu, d’autres étaient apparus. On a donc fait un toilettage nécessaire, qui permet désormais de mieux prendre en compte les diplômes des salariés et de leur garantir la rémunération qui va avec », précise la responsable CFDT.
Autre accord signé en 2022, celui sur la complémentaire santé : il permet aux salariés de bénéficier d’une garantie d’assistance, de l’accès à un réseau de soins pour l’optique, le dentaire, les audioprothèses et l’ostéopathie ainsi qu’un dispositif de « degré élevé de solidarité », c’est-à-dire des aides financières, de la prévention, selon ce dont a besoin le salarié. Plus récemment encore, en septembre 2024, organisations syndicales et patronales ont formalisé un accord relatif à la formation. « Le secteur a besoin de 100 000 personnes qualifiées par année, alors qu’il n’y a que 50 000 nouveaux formés », souligne Stéphanie Dayan.
Le texte, qui doit entrer en vigueur en 2026, permettra de renforcer l’accompagnement des nouveaux salariés du secteur et d’améliorer la formation continue. Enfin, le récent accord sur la qualité de vie au travail acte la mise en place de jours de congés rémunérés pour les parents d’enfant malade et hospitalisé, à condition d’avoir une année d’ancienneté.
Mettre fin au régime dérogatoire
Si la CFDT a été motrice, ces dernières années, dans l’obtention d’avancées pour les salariés, elle ne reste toutefois pas satisfaite. Dans le secteur des hôtels-cafés-restaurants, les heures supplémentaires sont majorées de 10 % de la 36e à la 39e heure, de 20 % de la 40e à la 43e heure, et de 50 % par la suite. C’est moins que dans le code du travail, où la majoration est de 25 % pour les huit premières heures supplémentaires et de 50 % pour les suivantes.
Pour Stéphanie Dayan, qui souhaite en finir avec ce régime dérogatoire, « le salarié peut légitimement se demander pourquoi son travail vaut moins cher que dans d’autres branches ». D’autres chantiers sont à mener pour supprimer les coupures, créer un treizième mois à l’échelle de la branche, améliorer les conditions de travail de nuit, faire en sorte que les salariés bénéficient de deux jours de repos consécutifs…
« Les moins de 30 ans, majoritaires dans la branche, veulent autre chose, des plannings à l’avance, la fin des coupures… La société a changé, mais pas le secteur des hôtels-cafés-restaurants, assure la responsable CFDT. Alors, continuons le combat, il y a encore beaucoup de travail ! »
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