Extrait de l’hebdo n°3928
La décision est tombée le 8 juillet. Le fonds d’investissement britannique Greybull Capital, dernier candidat en lice, reprendra le groupe sidérurgique Ascometal, en redressement judiciaire depuis mars dernier. C’est un soulagement pour la CFDT puisque la quasi-totalité des emplois est sauvée.
1. L’aciérie de Hagondange (Moselle) et les trois sites d’usinage et de parachèvement, à Custines (Meurthe-et-Moselle), Saint-Étienne (Loire / Auvergne-Rhônes-Alpes) et Leffrinckoucke (Nord / Hauts-de-France). Le site de Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône / Paca), qui compte 333 salariés, a été repris par l’italien Marcegaglia en mai.
Les salariés d’Ascometal sont soulagés. En redressement judiciaire depuis mars 2024, après l’annonce du désengagement de Swiss Steel Group (SSG) un an auparavant, le groupe sidérurgique, qui fabrique des aciers spéciaux essentiellement pour l’industrie automobile, évite la liquidation. La chambre commerciale du tribunal judiciaire de Strasbourg (Bas-Rhin / Grand Est) a acté, le 8 juillet dernier, la reprise par le fonds britannique Greybull Capital de cinq des six sites que compte le groupe1. La quasi-totalité des emplois serait ainsi conservée, soit 760 sur un peu plus de 780 salariés.
L’entrée en jouissance de Greybull Capital devrait être effective au 20 juillet 2024. « C’est un soulagement pour l’ensemble du personnel après tant d’épreuves et de rebondissements », commente Alain Hilbold, délégué syndical central CFDT. Ces dernières semaines avaient encore vu deux potentiels repreneurs renoncer à leur projet.
Les atouts d’Ascometal
Le groupe, fleuron français dans le secteur de la métallurgie, a déjà connu deux redressements judiciaires en 2014 et 2017 avec des conséquences douloureuses sur l’emploi (fermeture de l’aciérie en 2017 et du laminoir en 2020 sur le site des Dunes à Dunkerque).
“Ascometal possède toujours d’énormes atouts : le positionnement géographique de ses sites et, surtout, la détermination des salariés…”
Malgré la crise des semi-conducteurs, qui a fortement impacté ses marchés, et l’effondrement du marché de l’automobile ces dernières années, « Ascometal possède toujours d’énormes atouts : le positionnement géographique de ses sites et, surtout, la détermination des salariés dignes et prêts à relever les défis de demain, comme la fabrication décarbonée avec les aciéries électriques d’Hagondange [Moselle] et Fos-sur-Mer [Bouches-du-Rhône], estime Alain Hilbold. Pour nous, il était donc important que le repreneur ait des projets solides. »
“Nous avons limité la casse”
Sur le plan social, « nous sommes contents, nous avons limité la casse, poursuit le militant. Nos discussions avec Roland Lescure, le ministre délégué à l’Industrie, avec le soutien de la CFDT Métallurgie, ont permis de garantir l’emploi pendant trois ans. Nous avons également pu reconduire tous nos accords et usages dans l’acte de reprise, notamment l’accord relatif au compte épargne-temps, très important pour les salariés ».
Sur le plan industriel, en revanche, de gros changements s’annoncent. Greybull Capital s’est engagé à investir dans le groupe, par divers financements : 90 millions d’euros dans les cinq prochaines années. Et l’État français devrait lui prêter 45 millions cette année, suivis de 40 millions d’euros supplémentaires l’an prochain.
Les 175 millions d’euros ainsi mis sur la table devraient servir des investissements industriels d’ampleur, principalement le redémarrage du laminoir de Leffrinckoucke (Nord) et la mise sur pied d’une « voie lingot » à Hagondange, destinée à produire des lingots pour la fabrication d’obus. « Le groupe entend ainsi se diversifier sur le marché de l’armement », explique Alain Hilbold.
“Il faut redonner confiance aux salariés”
Pour l’heure, Ascometal est concentré sur les marchés de l’automobile, de la mécanique, du pétrole et du gaz. « La CFDT est prête à accompagner ce projet, confie le militant. Mais nous serons vigilants à ce qu’il ne s’agisse pas d’un chèque en blanc. Il faut redonner confiance aux salariés. Beaucoup ont démissionné lors de l’annonce de la mise en redressement judiciaire. Nous rouvrirons le bureau des embauches à partir de septembre pour recruter les profils qui nous manquent aujourd’hui. C’est un bon signal. Nous avons vécu d’énormes rebondissements dans ce dossier, mais les choses se décantent. C’est un nouveau départ. Nous sommes optimistes… »
« Bravo aux militants engagés dans la sauvegarde de l’ensemble des sites, a, de son côté, réagi Christèle Khelf, secrétaire générale adjointe de la Fédération générale des Mines et de la Métallurgie (FGMM-CFDT), chargée du secteur sidérurgie. Tous ont fait preuve d’un investissement sans faille dans l’intérêt du collectif, des salariés. Même si tout est à construire maintenant avec les nouveaux repreneurs (Greybull, Marcegaglia), les bases sont là et la relève sera assurée. »