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Extrait de l’hebdo n°3915
Attendue depuis plus d’un an, la loi d’orientation pour la souveraineté agricole et le renouvellement des générations en agriculture devrait être discutée à l’Assemblée à partir du 13 mai. La CFDT-Agri-Agro dénonce un texte sans ambition qui fait peu de cas des salariés du secteur.
Présenté en conseil des ministres le 3 avril dernier, le projet de loi d’orientation pour la souveraineté agricole et le renouvellement de générations en agriculture a déçu les organisations syndicales du secteur. Le texte – dont la présentation avait été repoussée afin de prendre en compte le mouvement des agriculteurs de ce début d’année – n’a rien de la grande loi censée accompagner la transformation du modèle agricole français dans les années à venir. « C’est une loi en panne d’orientation », dénonce la CFDT Agri-Agro, qui s’était pourtant investie dans les travaux préparatoires. « Elle n’apporte pas de réponse structurelle, insiste Franck Tivierge, secrétaire national de la fédération. Il y a de petits éléments positifs mais, dans l’ensemble, notre appréciation est très mauvaise. Le monde agricole mérite autre chose que des mesures de simplification administrative. »
Quid des salariés agricoles ?
Pour la CFDT, un point est particulièrement révoltant : l’absence de mesures en direction des salariés agricoles. « Une marque de mépris » selon la fédération, qui rappelle que les 390 000 exploitations agricoles emploient plus d’un million de travailleurs. Parmi eux, 80 % sont en CDD et au Smic horaire toute leur vie. « Le renouvellement des générations s’appuiera de plus en plus sur le salariat. Celui-ci ne doit plus être vu comme occasionnel. Le salarié agricole de demain sera plus qualifié, plus autonome. C’est ce sujet que la loi devrait creuser et accompagner, souligne Alexandre Dubois, secrétaire général de la CFDT-Agri-Agro. Les salariés font partie de la solution, et il est temps que leur juste place soit mise en lumière dans le débat public. »
Cet « oubli » de la part du gouvernement est révélateur d’une perception souvent erronée du monde agricole, souligne le sociologue François Purseigle. « Les Français regardent l’agriculture avant tout comme ils la souhaitent et non comme elle est », répète souvent ce spécialiste du monde agricole, qui précise bien que « dans les centres de formation spécialisée, on pense encore trop souvent à l’insertion dans les métiers de l’agriculture seulement à l’aune de la seule installation des chefs d’exploitation ».
Un texte à faire évoluer
La CFDT-Agri-Agro compte à présent sur le législateur pour faire évoluer le texte, espérant que les salariés soient enfin une priorité, que l’on cesse de les réduire à un coût qu’il faut sans cesse alléger pour correspondre aux demandes des organisations patronales du secteur. « Nous voulons adresser un message clair au monde politique, insiste le secrétaire général de la fédération : le droit du travail en agriculture ne souffre d’aucun besoin de simplification, et les salariés agricoles ne devront en aucun cas être la variable d’ajustement face à une incapacité institutionnelle à définir et assumer un cap vers une agriculture durable. » Les débats au Parlement redonneront-ils du souffle à une loi qui, en l’état, en manque cruellement ?