Quel avenir pour le paritarisme ?

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iconeExtrait de l’hebdo n°3913

Dans la dernière ligne droite de la négociation “Pacte de la vie au travail”, et face aux menaces répétées de ponction et de reprise en main des organismes paritaires par l’exécutif, les numéros un des organisations syndicales et patronales ont réaffirmé leur très fort attachement au paritarisme.

Par Anne-Sophie Balle— Publié le 26/03/2024 à 13h00

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© Thierry Nectoux

La scène n’est pas banale. À quelques heures de l’avant-dernière séance de négociation relative au « Pacte de la vie au travail », leaders patronaux et syndicaux participaient à un débat sur l’avenir du paritarisme organisé par l’Association des journalistes de l’information sociale (Ajis). La publication par les syndicats de dix propositions communes, quelques heures auparavant, a mis un sérieux coup de pression au camp patronal, qui apparaît de plus en plus fissuré. « On ne va pas mener la négo devant vous », a d’ailleurs prévenu d’emblée le président du Medef, Patrick Martin, estimant qu’il fallait « laisser sa chance au produit ».

1. Compte épargne-temps universel.

Indépendamment du Cetu1, qui cristallise les positions des uns et des autres, l’inquiétude quant à l’issue des discussions reste très forte côté syndical, l’avant-projet patronal étant encore « loin d’une vision claire de là où se nouent les équilibres », juge Marylise Léon. Pourtant, elle l’assure : « Tant que la négociation n’est pas terminée, elle peut aboutir. » « Nous nous devons d’aboutir », a renchéri Patrick Martin (Medef), comme l’expression d’une responsabilité partagée. « La conclusion d’un accord emporterait l’homologation de la convention Unédic – ce qui, dans le panorama politique et social actuel, n’est pas neutre. »

Main basse sur l’argent du paritarisme

La multiplication des menaces du gouvernement au sujet d’une possible reprise en main de l’assurance chômage n’est en effet pas du goût des partenaires sociaux, qui jugent « agaçant de discuter avec un revolver au-dessus de la tête », résume Michel Picon (U2P). Mais les attaques contre le paritarisme « ne s’arrêtent pas à l’assurance chômage », rappellent les uns et les autres. En octobre 2023, l’exécutif avait déjà tenté de soutirer 1,2 milliard d’euros du budget des retraites complémentaires, également gérées par les partenaires sociaux. Entre temps, ces derniers ces derniers sont parvenus à faire « la preuve de leur efficacité, » en concluant un accord Agirc-Arrco. Et alors que Bercy doit encore trouver 20 milliards d’euros afin de boucler son budget 2024, il lorgne désormais sur les réserves de l’Unédic – en annonçant une ponction de 12 milliards d’euros sur quatre ans pour financer France Travail.

« À chaque crise, l’État a besoin d’argent et se tourne vers nous », résume Cyril Chabanier (CFTC), soulignant par là même que « s’il y a des réserves que l’État veut ponctionner, c’est que les caisses sont bien gérées ». Les 235 milliards d’euros gérés par le paritarisme sont pour Frédéric Souillot (FO) « un magot qui brille », dénonçant lui aussi la volonté de l’exécutif de mettre la main dessus. « On ne se laissera pas faire », affirme t'il, le meilleur moyen d’y parvenir étant selon lui de « continuer à faire vivre [le paritarisme] et à signer des accords ».

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© Thierry Nectoux

Un moment décisif

À propos de l'auteur

Anne-Sophie Balle
Rédactrice en chef adjointe de Syndicalisme Hebdo

La CFDT juge, quant à elle, que l’on est arrivé à « un moment décisif où le gouvernement doit soit arracher le sparadrap d’un coup, soit nous laisser gérer ». Dénonçant un « exercice du pouvoir totalement vertical », elle estime n’avoir « aucun intérêt à gérer un organisme dont les règles de fonctionnement ne sont pas clairement définies. Le paritarisme est quelque chose de vivant, et la vitalité de la négociation est une responsabilité des acteurs sociaux autant qu’une responsabilité du pouvoir politique à accepter qu’il existe une place faite à la démocratie sociale. Depuis sept ans, nous ne cessons de faire la démonstration que nous avons une légitimité, car nous connaissons le monde du travail ». Côté patronal, Patrick Martin (Medef) note que « le paritarisme, sous réserve de performance, est un gage de modernité et d’équilibre des pouvoirs ».