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Extrait de l'hebdo n°3955
Le gouvernement a envoyé un signal encouragent concernant la transposition de la directive européenne relative à la transparence des salaires. Cette bonne nouvelle dans la lutte contre les inégalités salariales entre les femmes et les hommes se faisait attendre…

À quelques jours du 8 mars – journée internationale des droits des femmes –, une éclaircie est apparue du côté du gouvernement en ce qui concerne la lutte contre les inégalités salariales. Après des mois d’incertitudes, « la transposition de la directive européenne sur la transparence des rémunérations est en cours. Je voudrais que nous aboutissions à un texte discuté avec les partenaires sociaux d’ici à septembre 2025 », a affirmé la ministre chargée du travail et de l’emploi, Astrid Panosyan-Bouvet, dans une interview à l’AEF publiée le 27 février.
Ces propos confirment ce que sa collègue chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, Aurore Bergé, avait annoncé devant la délégation aux droits des femmes du Sénat quelques jours plus tôt : « Cette année, nous renforcerons ce dispositif [l’index de l’égalité professionnelle] à l’occasion de la transposition de la directive européenne sur la transparence des rémunérations. Nous souhaitons un véhicule législatif autonome. » Enfin des signes de bonne volonté… alors que la directive attend depuis près de deux ans d’être transposée.
Transparence, indicateurs…
C’est que ce texte « visant à renforcer l’application du principe de l’égalité des rémunérations entre les femmes et les hommes pour un même travail ou un travail de même valeur » propose toute une série de mesures. « Il y a plusieurs axes », résume Isabelle Nicolas, directrice opérationnelle chez Sextant Expertise. « La directive prévoit la transparence lors de l’embauche, avec la publication de la rémunération et l’interdiction de demander le niveau précédent de rémunération. Elle prévoit une transparence dans l’entreprise, avec la possibilité pour les salariés de connaître leur positionnement par rapport à leurs collègues. » Autre point important, « elle prévoit aussi la publication de toute une batterie d’indicateurs pour objectiver les différences de rémunération entre les hommes et les femmes et qui va plus loin que l’index de l’égalité professionnel français actuel ».
Et d’ajouter : « Sur de nombreux éléments, on est dans la continuité de ce qui se faisait déjà en France. Ce qui peut changer avec la directive, c’est la question de la définition du “travail égal”. » En effet, la directive demande aux États membres de mettre en place les mesures visant à garantir l’égalité des rémunérations pour un même travail ou un travail de valeur égal, avec un système permettant de faciliter la comparaison. « Nous ne sommes plus sur des catégories socioprofessionnelles ou des classifications internes. Là, l’idée, c’est d’aller dans le détail afin de comparer au mieux les salariés et leurs rémunérations », souligne Isabelle Nicolas. La directive aura aussi quelques effets bénéfiques dont profiteront les militants syndicaux : « Les indicateurs étant plus détaillés et plus ciblés que l’index, ça devrait donner une information plus objective pour négocier par la suite. »
Entrer dans le vif des discussions
Côté CFDT, la bonne volonté gouvernementale est accueillie favorablement. « Nous attendons désormais d’entrer dans le vif des discussions », indique Béatrice Lestic, secrétaire nationale de la CFDT. Une première réunion bilatérale avec le cabinet de la ministre du Travail, en janvier dernier, a permis d’en savoir plus sur les intentions du gouvernement. « Ce qui nous a été présenté comme pistes de travail nous convient bien, y compris l’idée de supprimer l’index tel qu’il existe aujourd’hui ou de changer sa composition pour qu’il corresponde à la directive », détaille la secrétaire nationale.
Concernant la notion de travail à valeur égal, « c’est plus complet que le droit français », remarque Béatrice Lestic, qui pense qu’il faudra accomplir un gros travail en matière de classifications, ce qui ouvrira peut-être la possibilité de comparer des métiers de valeur identique mais de champs professionnels différents. Quant à la transparence salariale, à l’embauche et dans les entreprises et administrations (la directive concernant les travailleurs des secteurs privé et public), « elle ne fait pas de difficulté », selon le gouvernement et la CFDT. Une transparence « qui fera bouger les lignes », estime la secrétaire nationale.
Si ces nouveaux dispositifs doivent permettre d’en finir avec les écarts de rémunération non justifiés (4 % en défaveur des femmes, selon l’Insee), les autres causes des inégalités salariales ne sont pas traitées par ce texte. En effet, à temps de travail identique, les femmes perçoivent 14,9 % de salaire en moins que les hommes. Au total, tous temps de travail confondus, l’écart est de 23,5 % en défaveur des femmes. « La directive ne réglera pas les questions de maternité, de temps partiel subi, de ségrégation professionnelle, de stéréotypes de genre, de conciliation vie privée-vie professionnelle, qui sont aussi à l’origine de ces inégalités, relève Béatrice Lestic. Cependant, ce questionnement sur le travail de valeur égal, si nous faisons bien notre travail syndical, ça peut produire d’importants résultats ! » Réponse dans quelques mois ?!
Une CFDT mobilisée le 8 mars pour les droits des femmes
À l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, traditionnellement célébrée le 8 mars, la CFDT se mobilise. Les militantes et les militants sont appelés à rejoindre les cortèges qui auront lieu partout en France ce jour-là et à participer aux différentes initiatives organisées par les fédérations, les unions régionales interprofessionnelles, les entreprises et les administrations…
Par ailleurs, en lien avec la préparation du prochain congrès confédéral, quatre webinaires sont prévus durant le mois de mars au sujet de l’égalité professionnelle, de la santé des femmes au travail, des femmes et des transitions (écologiques, etc.) ; le quatrième webinaire permettra de travailler sur la feuille de route de la CFDT relative aux questions d’égalité femmes-hommes en vue du congrès de Bordeaux de juin 2026. Ces webinaires sont à retrouver sur la plateforme CFDT « Je participe ».